Houleuse rencontre

La jeune lingère sortait du pavillon nord par une petite porte extérieure aménagée pour le personnel de la Régente du royaume de France. Elle tenait à deux mains une corbeille chargée de blancs vestements. Sans doute provenaient-ils de la garde-robe de la Régente elle-même. Elle était pressée et soufflait à en perdre haleine. Elle s'arrêtait de temps à autre pour remettre en place une mèche de cheveux épars collés au front par la sueur. De son petit pas elle allait, longeant les galeries sous les arcades, pressée, et ne prêtant aucune attention au brouhaha des gens de promenade à cette heure avancée de la matinée. D'ailleurs, ceux-ci non plus ne lui prêtaient guère attention. Elle était comme invisible à leurs yeux et se faufilait telle une souris qui rejoint son trou sans se soucier du monde qui l'entoure. Quoi de plus normal, en fait, qu'une simple servante ne fasse l'objet des regards curieux de ces personnes de haute extraction. Elle n'était rien. Ils avaient tout.

Arrivée à l'angle du chemin qui bifurquait à gauche, elle entendit des voix s'exclamer quelques mètres plus en avant. Il y avait là quelque agitation. Une rixe de gentilshommes qui, pour un propos déplacé, un léger effleurement, s'étaient donnés en duel, pensa-t-elle. Ou peut-être était-ce pour la main d'une belle jeune femme qu'ils en étaient venus à se quereller. Elle s'imagina un instant à la place de la donzelle et en rougit jusqu'aux oreilles. Elle chassa aussitôt cette pensée. Comment pouvait-elle s'imaginer être l'objet d'une telle rivalité entre deux galants de la Cour ?
Elle continua d'avancer sans lever la tête. Les voix élevées se rapprochaient. En plus de cela, l'écho du sol martelé par de lourds poids résonnait dans toute la place. Le bruit se rapprochait. Le martèlement continuait. Soudain, la lingère fut propulsée en arrière, sa corbeille étalée à côté d'elle. Après quelques secondes à se demander ce qui lui était arrivé, l'infortunée se releva et se retourna pour voir quel avait été la cause de sa chute.

Le bas de sa cape trainant au sol, le pas rapide, le comte Thierry d'Armancourt ne s'était même pas arrêter pour relever la pauvrette qu'il avait malencontreusement percutée. Ses yeux d'un noir d'encre jetaient des éclairs sur quiconque osait croiser son regard, sa bouche écumait. Son pas ébranlait le sol. On eut dit que les arcades allaient s'effondrer sur son passage.
Le comte s'en revenait de l'hôtel où logeait sa cousine, la comtesse d'Eu. A le voir ainsi déambuler, il semblait qu'il avait à nouveau échoué dans ses tentatives de reprendre le comté à sa parente. Une ire incommensurable émanait de toute sa personne, et bien mal en prendrait à qui aurait la sotte idée d'aller le provoquer.

Le comte avançait sans but précis, si ce n'est celui d'évacuer toute la rage contenue dans son corps de géant. Il bifurqua à droite. Là, il s'arrêta net. Un pas de plus, et il envoyait une seconde personne au sol.
C'en était trop pour la même journée. Il s'écria:

« Regarde donc là où tu mets les pieds, vil... »

Le comte ne finit pas sa phrase. Il venait de reconnaître la personne se tenant debout face à lui.

La personne en question portait une robe rouge, et un chapeau de la même couleur. Il avait des traits effeminés, des mains délicates, et serrait un missel entre ses longs doigts. Il était affreusement pâle, et ses traits dégageaient toute l'impression d'orgueil d'une statue antique.

Le Cardinal de Thérould toisa ouvertement Thierry d'Armancourt. Les pavillons de son nez s'agitaient au rythme de sa respiration.

Il sortait des appartements de la dame de Sigognac, dame fort pieuse qui songeait à léguer la moitié de sa fortune à l'Eglise, et il sortait avec une promesse de sa part, ce qui était plutôt jouissif. Du moins, jusqu'au moment où cet... ours avait failli lui rentrer dedans, avant de manquer de l'insulter gravement.

"Monsieur d'Armancourt, quelle surprise de vous voir ici! Et de fort méchante humeur qui plus est!"

Ce n'était évidemment pas le genre de chose à dire face à quelqu'un qui vous regarde en fulminant et qui a failli vous faire tomber, puis vous insulter. Mais le Cardinal de Thérould avait une position suffisamment importante et un ego suffisamment développé pour ne pas laisser passer ce genre de chose. Autant il ne faisait que déverser un flot d'insultes perfides à ceux qui l'insultaient dans les bas-fonds de Paris, car ce n'étaient que des gens vulgaires qui ne méritaient pas son attention; autant il réservait une longue souffrance aux nobles qu'ils rencontraient à la cour, car eux n'avaient pas cette excuse du manque d'éducation.

Vil quoi? Qu'aurait donc dit ce damoiseau? Le Cardinal de Thérould était assez au courant des réputations de chacun, et il connaissait celle de Thierry d'Armancourt. Le style de vie qu'il menait avait toujours inspiré du mépris à son Eminence, mais rien de personnel. A présent, il avait cet homme en face de lui, et il l'insultait! C'était inconcevable de faire cela à un homme de Dieu, surtout lorsque l'on chosissait de suivre la voie de la dive bouteille et des jupons.

Le Cardinal de Thérould dit avec un ton des plus glacial et un regard furieux:

"Quel épithète désiriez vous m'accorder mon cher comte?"

Peu à peu, Thierry d'Armancourt reprit une respiration normale. L'effet de surprise passé, il se rendit de compte de la gravité des propos qu'il venait de tenir, et surtout à qui il venait de les tenir. S'il s'était agi d'un quelconque individu de la Cour, un laquais, voire même une personne de son rang, le comte lui aurait déversé sa rage dessus. Mais là, il s'agissait d'un cardinal, et pas n'importe lequel ! Le cardinal de Therould. Si Thierry ne l'avait aperçu qu'en de rares occasions à la Cour, il connaissait tout de sa réputation. Le cardinal avait le bras long et il était de ceux qui obtenaient bien souvent faveurs auprès du roi. D'un claquement de doigts, il faisait tomber barons et seigneurs en disgrâce.

Thierry fut soulagé de n'avoir pas terminé sa phrase. Mais le cardinal ne semblait néanmoins pas devoir s'en contenter. De toute sa hauteur, et bien que le comte le dominât d'une bonne tête, il lança d'un ton acerbe cette apostrophe dont le seul but était de piquer au vif le colosse afin que celui-ci réagisse de manière encore plus virulente.
Thierry fit néanmoins preuve d'une incroyable réserve pour contenir la rage qui s'accumulait dans ses poings. Car s'il en était qui blêmissait devant pareil homme à l'imposante carrure, le cardinal, lui, n'en était guère impressionné et bien plus lui plaisait de voir ce genre d'individu perde contrôle de leurs moyens en de telles circonstances. En lieu et place, le comte répondit sur un ton calme, bien qu'encore échauffé:

« Votre Excellence, je suis moi aussi bien surpris de vous trouver en pareil endroit. Je vous pensais tout à vos sermons et non de promenade en cette morne matinée pleine de grisaille. Quant à ma méchante humeur, sachez qu'elle ne vous est en aucun point adressée. Je m'en reviens de chez ma cousine où j'y ai appris quelque fort mauvaise nouvelle. Si j'avais su que c'était à vous que j'avais à faire, pensez bien que jamais je n'aurais osé... enfin... vous manquer pareillement de respect. »

S'il était une chose que le comte Thierry détestait bien par-dessus tout, c'était celle des basses complaisances que s'adressaient quotidiennement gens de la Cour, alors qu'ils faisaient preuve de la plus grande hypocrisie en cachette. Lui aussi était pourtant tenu à ces règles que dictait la loi de la Cour. D'autant plus en ces temps où le comte d'Armancourt n’avait pas bonne réputation auprès des nobles du royaume depuis qu'il avait perdu ses multiples procès face à sa cousine. Et le cardinal lui-même n'était pas sans le savoir. Aussi regretta-t-il amèrement ce qu'il venait de dire. Voilà d'autres occasions qu'il fournissait au cardinal de lui faire reproches.

Mais l'homme au teint blafard qu'il avait en vis-à-vis ne s'arrêta pas là dans ses calomnieuses paroles. Visiblement, il n'avait toujours pas digéré les propos intempestifs qu'avait eu le comte à son égard. Il demanda de quel vilain nom d'Armancourt avait manqué de l'honorer.

« Comme je vous l'ai dit, si j'avait tantôt su que c'était sur vous que j'allais tomber... Mais ne vous en faites pas, je ne manquerai pas de réciter à voix haute quelques passage de la Sainte Bible sitôt rentré chez moi en signe de pénitence. »

Là encore, le comte d'Armancourt était allé trop loin. Voilà qu'à présent il usait de cynisme pour répondre au prélat de l'Elgise. Comme toujours, il était dans l'excès. Mais le ton hautain du cardinal et ses manières supérieures avaient suffi pour attiser la colère enfuie à l'intérieur du comte.

Sa cousine? Le Cardinal de Thérould tenta de se remémorer. La comtesse d'Eu. Le Comte d'Armancourt désirait obtenir ses propriétés. Il avait tenté tous les moyens légaux pour subtiliser à sa soeur ses possessions légitimes. Il était maladroit de rappeler au Cardinal ce genre de détail. Dans la haute hiérarchie catholique, la notion de propriété était sacrée, autant que celle de l'obéissance au pape. Ce genre de chose allait donc à l'encontre du code de morale que se dressait le Cardinal. Ce code de morale était certes bancal, notamment à propos des mauvaises fréquentations, mais Mgr de Thérould était inflexible là-dessus.

Ce crime contre la propriété fut rajouté à la longue ardoise des raisons d'être arrogant envers Armancourt.

Mais bon, le Cardinal n'était pas non plus aveugle: il vit bien les efforts que faisaient Thierry d'Armancourt pour garder un ton courtois et une maîtrise suffisante. Une telle volonté ne pouvait être ignorée. Il n'était pas irrécupérable, et Mgr de Thérould s'apprêta presque à le pardonner. Après tout, n'avait il pas fait lui même preuve d'une froideur déplacée?

Du moins était il près à le faire jusqu'au moment où Thierry d'Armancourt dit:

Mais ne vous en faites pas, je ne manquerai pas de réciter à voix haute quelques passage de la Sainte Bible sitôt rentré chez moi en signe de pénitence. »

Pour d'Armancourt, c'était un petit dérapage, une note de cynisme mal placée. Pour le Cardinal c'était un énorme blasphème!

Jamais il n'aurait demandé un acte d'une telle hypocrisie, le fait même que Thierry d'Armancourt y ait pensé prouvait qu'il le prenait lui, Narcisse de Thérould, était capable d'une telle hypocrite! L'interprétation était bien évidemment fausse, mais allez donc convaincre le Cardinal qu'il a tort!

"Je vous interdis de mentionner les Saintes Ecritures ainsi! Lire la Sainte Bible est un privilège sachez le et pas un pis aller pour gens désireux de laver leurs conscience à moindre coût! Mais enfin, quel genre d'homme êtes vous donc pour dire ce genre de choses?"

Les paroles étaient déjà blessantes, mais si on y rajoutait le ton, elles devenaient ouvertement venimeuses.

Le comte d'Armancourt toisa le cardinal de toute sa grandeur. Tous deux se fixaient dans les yeux, cherchant à intimider son opposant. Mais à ce jeu-là, il ne pouvait y avoir nul vainqueur. Chacun à sa manière possédait un caractère qui lui dictait de ne pas baisser le regard, de ne montrer aucun signe de faiblesse. Il ne fallait laisser aucune faille par laquelle l'adversaire pouvait frapper et donner le coup fatal.

Alors qu'il venait de lancer sa pique teintée de cynisme, le comte observa le visage, déjà pâle de nature, du cardinal se décomposer. Ses paroles avaient touché au point sensible de l'homme d'Église et l'on put voir l'esquisse d'un sourire se former au bout de ses lèvres.
Malgré la grande satisfaction que procurait au comte la vue de ce cardinal outré d'ouïr de tels propos, il ne venait pas moins de commettre un grave péché que celui du blasphème. Et s'il était homme de bien peu de morale en certains points de la religion, Thierry d'Armancourt, comme bon nombre de gens pour l'époque, et parmi les lettrés, croyait en la rédemption divine et ne manquait pas d'aller à confesse aussi souvent que l'en obligeaient ses "égarements", c'est à dire plus d'une fois la semaine. L'âme enfin apaisée, il s'en retournait dès lors transgresser les interdits promulgués par l'Église et la Sainte Écriture.

Malgré cela, son envie d'avoir le dernier mot sur le cardinal l'emporta sur sa raison. Il avança d'un pas et se pencha en avant au point de se trouver presque nez-à-nez avec son interlocuteur. Il déclara d'une voix grave:

« Le genre d'hommes qu'une personne telle que vous n'aimerait pas avoir pour ennemi. »

Ce qui n'était pas totalement faux. Mais à y réfléchir, Thierry se dit qu'avoir le cardinal de Therould pour ennemi était un inconvénient de plus grande envergure encore. Mais il était trop tard. Il avait scellé dans ses propos une inimitié réciproque qui allait perdurer jusqu'à ce que l'un des deux adversaires s'avoue vaincu. Ce qui en d'autres termes pouvait signifier la mort ou tout du moins la disgrâce de l'un ou de l'autre.

Le comte se recula et reprit une pose plus appropriée à la conversation.

« Tudieu ! Me voilà à nouveau blasphémant. Faites-vous également trafique d'indulgences ? En quel cas je serais bien content de pouvoir me racheter quelques années à passer au purgatoire. »

Thierry éclata d'un rire sardonique qui fit découvrir au cardinal son sourire carnassier. Le comte d'Armancourt donnait à voir l'image-même du malin ayant pris forme humaine.

Le Cardinal sentit que l'on avait franchi un cap, un point de non-retour. Il était hors de question que lui, Narcisse de Thérould n'aille reconnaître ses torts devant l'autre, mais Thierry d'Armancourt n'avait plus l'intention d'être conciliant. Pour le Cardinal ce n'était pas une grande perte. Il avait connu des ennemis tout au long de sa carrière, et il avait toujours survécu et fait plié les autres à sa volonté. Et il n'avait pas l'intention que cet enrubanné soit sa première exception.

Garçon faible et chétif, que les filles fuyaient, Narcisse de Thérould avait toujours méprisé les autres garçons nés beaux, forts et intelligents, capable de se mouvoir dans la société, et capable d'obtenir avec une facilité révoltante ce qui lui avait toujours été refusé, avant même qu'il ne devienne ecclésiastique: le succès auprès de la gente féminine. Evidemment, le Cardinal était au dessus de tout ca, mais ce n'était pas forcément l'avis de Narcisse, qui avait gardé, malgré tous ses efforts, les souffrances d'une enfance pas particulièrement agréable.

A vrai dire, en ce moment même, alors que Thierry d'Armancourt riait et blasphémait d'une horrible façon le Cardinal, ce n'était pas le Comte d'Armancourt qu'il voyait, mais Guillaume de Thérould, son frère aîné et haï.

Guillaume et d'Armancourt avait le même succès, Guillaume et d'Armancourt avait le même cynisme blasphématoire envers la religion, Guillaume et d'Armancourt étaient tout aussi insultant l'un que l'autre à l'égard de Narcisse de Thérould. Tous deux avaient le même orgeuil incommensurable. Tous les trois devrait il dire, car le domaine de l'orgueil était le seul dans lequel il était à égalité avec son frère. Il aurait pu se contenter d'avoir du ressentiment à l'égard de Thierry d'Armancourt, mais malheuresement, l'image de son frère venant du passé se superposait à celle de l'actuel Armancourt, et la haine que vouait Narcisse à Guillaume se superposa à l'arrogance dont faisait preuve Mgr de Thérould à l'égard du Comte d'Armancourt. Voilà pourquoi le Cardinal alla aussi loin dans la violence des sentiments exprimés.

« Tudieu ! Me voilà à nouveau blasphémant. Faites-vous également trafique d'indulgences ? En quel cas je serais bien content de pouvoir me racheter quelques années à passer au purgatoire. »

Ce cynisme incommensurable ne rajouta pourtant pas grand chose à la colère du Cardinal. Il ne pouvait pas être plus décomposé qu'à cet instant même. Il dit simplement, avec une voix grondante:

"Je pense que nous nous reverrons. Du moins, vous entendrez parler de moi. Tout comme, je suppose j'entendrais parler de vous."

Thierry d'Armancourt sentirait bien vite sa douleur. Sauf que...

Sauf que ces sentiments étaient nés de rien. Qui donc arbitrerait un conflit qui avait démarré à cause d'une occasion de bousculade? Déjà, qui dans la Cour de France prendrait au sérieux ce genre de chose? Le Cardinal n'avait pas la possibilité de perdre une seule fraction de sa réputation, surtout en ridicule.

Il devrait donc non pas faire appel à ses influences à la Cour du Roi, mais à ses contacts dans la Cour des Miracles. Il se mit à songer quelles forces dignes de la boîte de Pandore il pourrait relâcher sur le malheureux d'Armancourt.

Surtout qu'il n'avait pas connaissance de quelconques agissement souterrains de la part du Comte. Le Cardinal aurait donc une longueur d'avance.

Tout s'était enchaîné très vite. Il y avait d'abord eu cette situation embarrassante dans laquelle s'était retrouvé le comte d'Armancourt alors qu'il avait manqué de percuter le cardinal de Therould. L'incident aurait pu en rester là si, poussé par son grand amour propre, le comte n’avait pas pris le parti de répondre aux invectives du cardinal. Seulement, c’était aller à l’encontre de sa nature que de se laisser ainsi marcher dessus sans ne rien dire. Dès lors, il aurait été vain de vouloir interrompre ces deux personnages dont un ego surdimensionné poussait chacun à avoir le dernier mot. Et voilà que tous deux en étaient arrivés à un point de non-retour. Par leurs propos, ils s’étaient donnés pour ennemis jurés et aucun n’en démordrait.

« Je pense que nous nous reverrons. Du moins, vous entendrez parler de moi. Tout comme, je suppose j'entendrais parler de vous.

- Je le pense également. Mais n'ayez crainte; si ce n'est pas moi, il y aura toujours quelqu'un pour vous rappeler cette rencontre. »

Par ces mots, le comte d'Armancourt laissait sous-entendre que, loin d'oublier ce "petite accrochage", il allait tout mettre en œuvre pour nuire à la réputation du cardinal, à défaut d'atteindre sa propre personne. S'il n'était pas aussi influent que son rival parmi les nobles de la Cour, il avait tout du moins quelques pièces à dispositions. Des pièces qui bientôt entreraient en jeu. A commencer par son fidèle serviteur, exécuteur de toutes tâches dont le comte ne voulait avoir à s'en laver les mains.
Thierry se dit que son adversaire allait certainement user de la même stratégie. Il allait donc falloir rester sur ses gardes. Car le cardinal n'était pas le genre de personne que l'on provoquait en duel et que l'on pouvait occire de la pointe de l'épée en toute légalité. Désormais, un combat de l'ombre allait débuter.

« Eh bien, je dois avouer que ma matinée n'aura cessé d'être intense en rebondissements. Excellence, je vous souhaite la bonne journée. »

Le comte salua alors le cardinal d'une révérence sur jouée dont l'exagération s'approchait du ridicule. Cette dernière note ironique mit fin pour de bon aux relations plus ou moins amicales que tous deux avaient entretenues jusqu'à ce jour.
Se retournant, Thierry d'Armancourt revint alors sur ses pas et repartit dans la direction opposée.