Promenade à la découverte des lieux

Le matin qui suivit son arrivée dans la capitale, le chevalier de Vintimille, qui avait passé une fort bonne nuit dans le petit hôtel particulier mis à sa disposition par son cousin le marquis du Luc, ne se montra guère empressé de procéder aux démarches destinées à établir sa position. Les lettres de recommandation pouvaient bien attendre, malgré la promesse faite à monsieur du Luc de n'y souffrir aucun délai. Oubliées déjà les fatigues du voyage, il lui prit l'envie d'aller flâner dans le quartier afin de prendre la température de ce monde nouveau qu'il lui faudrait bientôt s'efforcer de conquérir - puisqu'il était un peu tôt, malgré tout, pour retrouver les lieux de plaisir qu'il avait brièvement connus lors de ses précédents séjours.

A vrai dire, il avait dormi fort tard et la matinée était déjà bien avancée, puisque les onze heures sonnèrent au clocher voisin lorsqu'il sortit de l'hôtel. La mise élégante mais sans trop d'ostentation, il se dirigea tout naturellement vers la Place Royale. Il lui sembla que la galerie des arcades serait l'endroit idéal pour tâter un peu le pouls du Marais. Chemin faisant, il avait pu constater combien le quartier s'était transformé depuis son dernier séjour, et l'élégance de certaines demeures lui rappelait quelque peu les beautés de sa ville natale - avec toutefois bien souvent un aspect pompeux dont même les plus parvenus des Aixois savaient se garder.

Il écoutait, observait, s'amusait de telle scène cocasse ou s'attardait un instant sur quelque charmant minois. Son oeil avisé remarqua même quelques courtisanes qu'une personne non avertie aurait pu prendre aisément pour quelque riche bourgeoise ou femme de petite noblesse.

* Fort bien ! Le marquis n'avait pas tort, dans le fond... Je devrais pouvoir trouver ici tout ce qui convient à mes aspirations, sans avoir à craindre les foudres de monsieur mon père ou de ses amis. Enfin la liberté ! *

C'est ainsi, les sens aux aguets tout en étant plongé dans ses pensées, qu'il parvint sous les arcades de la place, où se pressait déjà une foule bigarrée.